DECRYPTAGE DES MESURES D’URGENCE - Chronique III du 27 mars 2020
Principales mesures mises en place :
Remboursement à 100% des indemnités légales versées au salarié dans la limite de 4,5 plafonds du SMIC et assouplissement du formalisme applicable sont les par le décret du 25 mars 2020 modifiant le régime de l’activité partielle pour faire face au Covid-19.
Conditions d’application et Régime de l’activité partielle :
I. Quel est l’objet de l’activité partielle dans le cadre du coronavirus ?
L’activité partielle permet à votre société, lorsque vous faites face à des difficultés économiques, de déroger à votre obligation de garantir à vos salariés une durée du travail égale à la durée légale ou conventionnelle et de compenser en partie la perte de revenu subie par vos salariés.
Ce dispositif dérogatoire suppose :
Vous devez impérativement préciser dans votre demande d’activité partielle le motif : « circonstances exceptionnelles » et en sous motif « coronavirus » pour un traitement plus efficient de votre demande.
Cette demande devra, le cas échéant, être motivée. A ce titre, le ministère du travail a publié sur son site internet, une liste des cas visés.
Les voici :
Attention : cette liste demeure indicative et ne lie pas l’administration ni, le cas échéant, les juridictions.
Je vous invite donc à la plus grande vigilance. L’activité partielle n’est pas une compensation de la perte de chiffre d’affaires et ne doit pas être considérée comme une aide à la trésorerie.
Je vous conseille vivement de porter la plus grande attention à la motivation de vos recours aux activités partielles.
Attention : l’administration annonce des contrôles qui seront effectués a postériori pour s’assurer que les entreprises n’ont pas abusé du dispositif.
Tout abus pourra entraîner des sanctions civiles et pénales.
En cas d’interrogation sur ces points, n’hésitez pas à vous rapprocher de mon cabinet.
Le recourt à l’activité partielle peut être accordé pour une durée maximum portée à 12 mois (au lieu de 6 mois antérieurement au décret du 25 mars 2020), éventuellement renouvelable.
Attention : le décret ne modifie pas l’obligation pour l’employeur de souscrire des engagements lorsqu’il a, préalablement à sa demande, déjà placé ses salariés en activité partielle au cours des trente-six mois précédant la date de dépôt de la demande d'autorisation (me consulter).
II. Qui peut bénéficier de l’activité partielle ?
L’activité partielle est une mesure collective qui doit, comme telle, viser un groupe bien différencié de salariés affectés à la même activité.
L’administration avait déjà précisé, à titre indicatif, que la réduction ou l’arrêt total de l’activité devait concerner:
Cette liste indicative permet de vous guider dans l’adoption de cette mesure (me consulter). Il est dommage que le décret du 25 mars 2020 n’ait pas apporté plus de précision à ce titre.
En cas de réduction collective de l'horaire de travail, les salariés peuvent être placés en position d'activité partielle individuellement et alternativement, afin de pouvoir autoriser la mise en place d'un système de « roulement » par unité de production, atelier, services, etc.
L’activité partielle vise tout salarié de droit français, quelques soit la nature du contrat de travail, qui le lie à la société (CDD ou CDI, intérimaire, apprentis, contrat de professionnalisation…) et la durée du travail (temps partiel, temps plein).
Le décret apporte une modification substantielle concernant les salariés en forfait annuel en heures ou en jours.
Jusqu’ici, les salariés travaillant sur la base d’un forfait annuel en jours ou en heures étaient uniquement éligibles au régime de l’activité partielle en cas de fermeture totale de l’activité et ce, dès la première demi-journée d’inactivité totale. Ils étaient en revanche exclus du bénéficie de l’activité partielle dès lors que celle-ci se traduisait par une réduction d’horaire.
Le décret du 25 mars 2020 met fin à cette exclusion.
Désormais les salariés en forfait en heures ou en jours sur l’année sont éligibles au régime de l’activité partielle même si celle-ci se traduit par une réduction d’horaire.
III. Quelles formalités pour la mise en place de l’activité partielle ?
Depuis 2014, la procédure est dématérialisée : https://activitepartielle.emploi.gouv.fr.
En principe, avant de placer les salariés en activité partielle, vous êtes tenus de consulter pour avis les membres du CSE (au titre des consultations et informations récurrentes d’ordre public du CSE).
Le décret prévoit désormais une exception à cette consultation préalable des membres du CSE, si l’activité partielle due « à un sinistre ou à des intempéries de caractère exceptionnelle » mais, également, en cas d’activité partielle due « à toutes autres circonstances de caractère exceptionnel » telles que le Covid-19.
Désormais, vous disposez d'un délai de deux mois (maximum, à compter de cette demande) pour consulter le CSE et transmettre son avis à la DIRECCTE.
Attention : consultation est obligatoire dans les entreprises dotées d’un CSE.
Les membres du CSE devront disposer des mêmes informations que celles qui sont transmises à l’administration pour justifier la demande d’autorisation.
L’avis porte sur la nécessité et les modalités du recours à l’activité partielle.
Vous devez informer le CSE sur :
L’avis rendu ne lie pas l’administration.
Toutefois, si l’avis est défavorable, vous devrez communiquer à la DIRECCTE l’ensemble des documents remis aux membres du CSE.
En l’absence de CSE, vous devez informer directement les salariés de votre décision de recourir à l’activité partielle, de l’effectif concerné et de la durée envisagée.
En cas d’interrogation sur ces points, n’hésitez pas à vous rapprocher de mon cabinet.
La mise en activité partielle suppose l’autorisation de la DIRECCTE.
En principe, la demande d’autorisation est adressée à la DIRECCTE avant la mise en activité partielle des salariés.
Par exception, en cas de « circonstances de caractère exceptionnel » (telles que le coronavirus), vous disposez désormais d’un délai de 30 jours à compter du « placement des salariés en activité partielle pour adresser votre demande d’autorisation par tout moyen » lui conférant date certaine.
Jusqu’ici, cette exception était limitée au recours à l’activité partielle en raison « d’un sinistre ou à des intempéries de caractère exceptionnel ».
Le décret du 25 mars 2020 étend cette exception.
Jusqu’au 31 décembre 2020, la DIRECCTE dispose d’un délai de 2 jours calendaires à compter de la date de réception de la demande d'autorisation. En principe, ce délai court à compter du moment où le dossier de la demande est réputé complet.
A défaut de réponse dans ce délai, l’autorisation est accordée tacitement.
Le décret ramène donc le délai d'acceptation exprès ou tacite des demandes d'autorisation préalable de 15 à 2 jours.
IV. Heures chômées indemnisables
Ouvrent droit à l’allocation d’activité partielle, les heures chômées dans la limite de la durée légale ou, lorsqu’elle est inférieure, la durée collective du travail ou la durée stipulée au contrat sur la période considérée.
Au-delà de cette durée, les heures chômées n’ouvrent droit ni au versement par l’employeur d’une indemnité au salarié, ni au versement par l’employeur de l’allocation d’activité partielle.
Le nombre d’heures chômées prises en charge dans le cadre de l’activité partielle reste limité par un contingent annuel fixé actuellement à 1.000 heures par an et par salarié.
Cette période d’un an s’apprécie à compter du 1er jour de la période d’autorisation et non en année civile. Cette limite ne peut être dépassée que dans des cas exceptionnels résultant de la situation particulière de l’entreprise sur décision conjointe des ministres chargés de l’emploi et du budget. (me consulter).
La Ministre du travail a profité de ce décret pour modifier les dispositions applicables aux entreprises qui recourent à l’activité partielle pour moderniser l’entreprise et qui peuvent dans ce cadre bénéficier d’un contingent fixé à 100 heures par an et par salarié. Le décret étend ces mesures dérogatoires aux entreprises qui recourent à l’activité partielle pour « transformer ou restructurer l’entreprise ».
V. Comment les salariés sont-ils indemnisés ?
Les salariés placés en activité partielle perçoivent une indemnité d’activité partielle calculée sur la base de 70% de la rémunération brute du salarié.
Assiette : l’indemnité de congés payés, ramenée à un montant horaire.
En principe, le nombre d’heures pouvant justifier de l’attribution de l’allocation d’activité partielle correspond à la différence entre la durée légale du travail sur la période considérée ou, lorsqu’elle est inférieure, la durée collective du travail ou la durée stipulée au contrat, et le nombre d’heures travaillées sur ladite période.
Par exception, cette formule doit cependant être adaptée dans le cadre de certains modes d’aménagement du temps de travail (forfait en heures hebdomadaire, forfait en heures mensuel, modulation, cycle de travail, annualisation, régime d’équivalence, quid des jours fériés et de la journée de solidarité…) (me consulter).
Le décret du 25 mars 2020 a notamment modifié les modalités de calcul de détermination du nombre d’heures indemnisables dans le cadre de forfait en heure ou en jours sur l’année. Dans ce cas, leur indemnisation est calculée en retenant comme base la durée légale correspondant aux jours de fermeture de l’établissement ou aux jours de réduction de l’horaire de travail pratiquée dans l’établissement, à due proportion de cette réduction. (me consulter).
Il vous appartient de verser l’indemnité d’activité partielle à l’échéance normale de la paie.
Désormais, doivent apparaître sur le bulletin de salaire remis au salarié (et non plus sur un document) :
Un document comportant les mentions ci-dessus évoqués est désormais remis uniquement par l’agence de service et de paiement en cas de procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire.
L’articulation entre l’activité partielle et les procédures de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire sont particulières. (me consulter).
VI. Remboursement de l’employeur
Alors que, jusqu’à présent, l’entreprise n’était remboursée par l’Etat que sur la base du SMIC par salarié, cette fois l’Etat s’engage à vous rembourser toutes les sommes versées dans la limite de 4,5 smic.
Ainsi, l’employeur a droit à une allocation dont le taux horaire est égal à 70 % de la rémunération horaire brut, limitée à 4,5 fois le taux horaire du Smic. Ce taux horaire ne peut pas être inférieur à 8,03 € (taux horaire équivalent au Smic net).
L’employeur se fera rembourser la même somme par l’Etat, sans reste à charge. L’allocation est versée par l’Agence de services et de paiement (ASP) pour le compte de l’Etat.
Pour obtenir l’allocation, vous devez adresser, à la fin de chaque mois, une demande d’indemnisation à l’Agence de services et de paiement (ASP) via votre compte Internet.
NB : Pour les salariés en contrat d’apprentissage ou de professionnalisation, l’allocation d’activité partielle ne peut pas être supérieure au montant de l’indemnité horaire due par l’employeur et le taux horaire minimum de 8,03 € ne leur est pas applicable.
Si vous avez la moindre question sur l’application de ces dispositions, appelez ou écrivez moi.
Mon équipe et moi-même sommes à votre disposition.
Bon courage à tous !
Thierry Ygouf
Avocat à la Cour
thierry.ygouf@west-avocats.fr